OPINION - “La Belgique n'a aucun problème avec l’abordabilité du logement”

En dépit de la crise du coronavirus, les prix de l’immobilier en Flandre ont à nouveau fortement augmenté au cours de l’année écoulée. D’environ 6% pour être précis. Cette information soulève la question chez certains de savoir si nos biens immobiliers sont toujours abordables et si nos maisons ne deviennent pas peu à peu trop chères. Surtout pour les jeunes ménages qui achètent leur première maison ou premier appartement. « Une crainte totalement injustifiée », déclare le spécialiste de l’immobilier Johan Krijgsman, CEO de ERA Belgium, un des plus grands groupes immobiliers en Belgique. « L’abordabilité de nos maisons dépend de bien plus que du ‘prix sec’ de l’habitation. »

5,93%. C’est ce que vous avez payé en plus pour acheter une même maison en 2020 que l’année précédente. La sixième hausse consécutive – et peut-être pas la dernière. Logique, car tout devient un peu plus cher chaque année. Et c’est donc vrai aussi pour le ‘prix sec’ d’une maison. De nombreuses personnes estiment d’ailleurs que les prix de l’immobilier deviennent inabordables. « Pour les jeunes Belges, il devient quasiment impossible d’acheter une maison », entend-on souvent dire. Mais alors, pourquoi ces mêmes jeunes continuent-ils à acheter des maisons ? L’explication est – comme c’est souvent le cas – beaucoup plus nuancée. Après tout, l’accessibilité financière d’une habitation ne se résume pas à ce ‘prix sec’.

Ainsi, un taux d’intérêt historiquement bas rend les prêts au logement beaucoup moins chers. Un regard sur le baromètre des taux d’intérêt révèle que le taux d’intérêt moyen a presque diminué de moitié en cinq ans. Au début de l’année 2016, il était juste en dessous de 1,9%, alors qu’en 2020, il était tombé sous la limite symbolique de 1%. Et si l’on regarde encore plus en arrière, le taux d’intérêt moyen était bien plus élevé : en 2010, par exemple, il dépassait même les 4%. Chaque année, des voix s’élèvent pour affirmer que le taux d’intérêt ne peut pas continuer à baisser, mais chaque année, cela continue de se produire. Et tant qu’il n’aura pas atteint zéro, il peut continuer à baisser. D’autant plus qu’à l’heure actuelle, aucun signe ne semble indiquer une augmentation.

Prenons un exemple concret pour bien montrer l’impact de ce taux d’intérêt plus bas. Si vous aviez contracté un emprunt d’environ 250.000 euros en 2010, c’était à un taux d’intérêt moyen d’environ 4%. À ce taux, vous auriez payé environ 1.300 euros par mois – sur une durée standard de 25 ans. Si vous faisiez le même calcul avec un taux d’intérêt moyen aujourd’hui – autour de 1% donc – vous ne paieriez qu’environ 950 euros par mois. Un monde de différence…

Parallèlement, les revenus augmentent également. Selon les derniers chiffres (de Statistiek Vlaanderen), ils affichent une hausse d’environ 1,2% par an, depuis 2006. À l’heure actuelle, le salaire mensuel moyen s’élève ainsi à 1.842 euros. En d’autres termes : le candidat-acheteur moyen peut dépenser chaque année environ 20 euros de plus par mois pour son prêt immobilier. À première vue, cela peut sembler un petit montant, mais sur le crédit standard de 25 ans repris ci-dessus, cela vous permet d’obtenir facilement environ 5.000 euros de budget supplémentaire auprès d’une banque aujourd’hui.

Et puis il y a l’inflation, qui stagne depuis le début de l’année dernière. L’indice des prix à la consommation s’élevait à 109,69 points en janvier 2020 pour 109,49 points en décembre 2020. Il a donc très légèrement baissé. Bref, non seulement notre panier n’est pas devenu plus cher l’année dernière, mais il nous a même coûté un peu moins cher. Et cela pour la première fois depuis longtemps. La valeur de votre argent n’a dès lors pas diminué non plus, ce qui est bon pour votre pouvoir d’achat et donc, pour le budget que vous pouvez consacrer – par exemple – au remboursement d’un crédit immobilier.

Le problème avec l’exposé ci-dessus, c’est qu’il requiert toute votre attention, que vous devez le lire attentivement. La vérité est simplement beaucoup plus complexe qu’un simple message comme ‘le prix des maisons augmente’ ou ‘les maisons deviennent plus chères’. D’un point de vue purement technique, de telles allégations sont bien sûr correctes, mais elles ne disent pas grand-chose sur l’accessibilité financière des habitations.

Alors, regardez toujours les choses dans la bonne perspective, avec les bonnes nuances, et ne tombez pas dans le piège du catastrophisme inutile. Les logements en Belgique restent – du moins jusqu’à aujourd’hui – assez abordables. Pour vous en convaincre, jetez un œil sur les prix des maisons de nos voisins hollandais. La dernière augmentation de prix qu’ils ont signalée, en novembre, était de 9%. Une sacrée différence, pas vrai ?

Johan Krijgsman, CEO de ERA Belgium

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